dimanche 3 juillet 2016

Lumière


Elle dit un de ces mots qui la font rire. C’est un mot qui appartient à l’enfance. Familier. Pas grossier. Un peu bête.

Le mot rebondit dans la maison silencieuse. Je l'entends se cogner contre les meubles, contre les murs. Je fronce les sourcils, dans une posture réclamant le calme : Mélissa fait ses devoirs en bas. Manon s’interrompt et m’observe effrontée, amusée d'avoir lâché le mot, qui s'ébroue quelque part, dans une pièce voisine, comme un jeune chat avide de folies. 

Une seconde et le temps s’arrête. Un rire émerge au bord des yeux de Manon. Je le vois gonfler dans sa gorge. Elle ne résiste pas et le laisse éclater, sonore, s’y abandonne avec délectation. Je la regarde. J'ai devant moi toute la joie de l’enfance incarnée dans une fillette malicieuse. Elle est belle et son rire résonne, un son cristallin dans le silence. Magnifique. Irrésistible.

Maintenant, elle roule par terre en se tenant les côtes. Elle est dans toute la sincérité de l’instant, du merveilleux instant qui s’inscrit dans ma mémoire. Le rire se poursuit. La joie s’étire, se dilate dans la pièce. Elle me frôle, brise mes barrières et rayonne en moi. Je souris, puis ris à mon tour. 

Un son peut-il avoir une lumière ? Le rire envahit la pièce, la maison toute entière, faisant jaillir une lueur irréelle, invisible, dont je sens bien la chaleur. Elle est là partout, bienveillante, rayonnant dans l'écho du rire qui s'apaise peu à peu. Le silence revient et nous nous regardons. Nous avons, avec Manon, le même sourire au coin des lèvres qui fond doucement jusqu'à cet endroit du cœur où s'impriment les moments de bonheur. 

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