dimanche 26 juin 2016

Atelier d’écriture du 18 juin 2016 : « de l’autre côté du miroir »

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Lectures : poème de Raymond Queneau « La chair chaude des mots », inventaire de Georges Perec « J’aime, je n’aime pas », extrait de Mon traitre de Sorj Chalandon

Exercices d'écriture :

  1. Sur le modèle de Pérec, faire un inventaire de 7 « J’aime » et 7 « Je n’aime pas » avec des mots hétéroclites
  2. Choisir un élément dans chaque liste (en gras dans le texte)
  3. Ecrire un texte contenant ces deux éléments et commençant par « C’est l’histoire de… »
  4. Ecrire une scène de montré-caché : montrer les états d’âme du personnage par son regard sur l’extérieur, sans nommer ce sentiment
  5. Lier ces deux textes en un seul


Je traverse le salon où les filles jouent en faisant murmurer des personnages imaginaires. Sans les interrompre, je me faufile dans la cuisine. Il est midi pile. La table est déjà mise, j’ai juste oublié les petits couverts colorés de Manon. Sur la plaque, une casserole d’eau salée attend que j’allume le feu pour se mettre à bouillir. C’est un répit dont semble se réjouir le sachet de pâtes fraîches qui penche crânement contre le pot de spatules. Saluant lui aussi ce sursis, un rayon de soleil éclaire la pièce tout à coup. Il se ménage malicieusement un espace entre les nuages. J'entends le four qui préchauffe en ronronnant. C’est une berceuse au zénith du jour qui accompagne le murmure des filles.
C’est l’histoire d’un voyage.
Je profite de cet instant de calme pour lire un article dont le titre avait attiré mon attention ce matin : « Souvenir de Martinique. Itinéraire d’un écrivain créole. » Il s’agissait d’un texte qui croisait la critique d’un roman et l’histoire de l’île à travers le parcours du personnage principal. J’avais posé le magazine sur un coin du buffet en espérant qu’une parenthèse de silence me permette d’en faire la lecture.
Le miracle se produit, étonnement juste avant l’heure du déjeuner. La fin de matinée est souvent propice aux disputes, caprices et autres chicaneries, mais pas cette fois. Convaincue que l’instant sera fugace, j’ouvre le magazine, cherche la page en retenant mon souffle et me mets à lire avidement. Un passage retient immédiatement mon attention. Il est question d’un parc à la végétation d’un « vert hypnotique. » D’un vert hypnotique. Cette simple expression me fait voyager.
Aussitôt, je m’approprie l’endroit. Je dessine à la hâte un personnage que je pose là, au milieu des bougainvilliers. Sous ses doigts, j’inscris la caresse des herbes hautes. Je mets dans ses cheveux l’odeur de l’huile de coco. Je m’amuse de voir ses yeux se plisser face aux rayons du soleil. Je suis sur le point d’étendre le tableau à une mangrove là-bas, à une maison de style colonial plus loin, lorsque, me sortant brusquement de ma rêverie, j’entends, dans la pièce voisine, les cris stridents de Manon.

dimanche 19 juin 2016

Evidence


Salma a lu mon roman. Nous nous sommes vues cette semaine pour en parler. Sur le chemin, j’avais peur de ce qu'elle allait me dire. Et puis, je me suis rappelée que j’allais voir Salma, qu’elle trouverait les mots. Ce serait moins difficile à entendre. En même temps, je m’accrochais au souvenir de mes personnages. Je les ressentais, comme un écho, dans ma poitrine. Ils me soufflaient que rien ne pourrait advenir de mauvais, qu'ils étaient assez solides maintenant pour revendiquer leur droit à exister. Je baignais mon appréhension dans cet état de confiance.

dimanche 12 juin 2016

Atelier d'écriture du 4 juin 2016 : écriture d'une nouvelle

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Cette séance fut plus longue : marathon de 5h30 avec, à la clé, l’écriture d’une nouvelle. 

Lectures qui ont ponctué la séance : « Seul le vent » poème de Laurent Gaudé, extrait d’ « Une chambre à soi » de Virginia Woolf, extrait de « Joseph » de Marie-Hélène Lafon, extrait de « Dans la main du diable » de Anne-Marie Garat, extraits de « Neuf histoires et un poème » de R. Carver


L'empreinte

Je ne sais plus. Que lisais-je déjà ? Moi qui aime tant lire, qui notifie scrupuleusement chaque impression de lecture, comment ai-je pu oublier précisément celle-là ?
Au-dessus de ma tête, le vent faisait danser les branches des arbres. Il était bienveillant. Il faisait silence en moi. Tout s’était éteint alentour, à l’exception du vent qui soufflait doucement sur les pages de mon livre pour me rappeler sa présence. Peut-être voulait-il me distraire. Mais ses tentatives restaient vaines, j’étais imperturbable. Perdue dans un ailleurs créé par un autre, je me laissais bercer par les mots, les images que le récit faisait naître dans mon esprit. Le paysage que mes pensées traversaient m’échappe, mais je me souviens de la sensation : je voyageais, immobile, dans un écrin de verdure préservé de toute temporalité. Je parcourais le monde à l’abri dans mon corps.

dimanche 5 juin 2016

Final

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Depuis une semaine, je me suis résolue à le poser. J’étais partagée entre la hâte, l’impatience et l’appréhension. Et puis, il a fallu que je me rende à l’évidence. A la fin de la dernière ligne, mes mains sont restées sur le clavier, immobiles. C’était terminé. Après tout ce temps, tous ces mots jetés sur le papier, toute cette encre, ces cahiers noircis, ces kilo-octets de fichiers, ces courriers ébauchés, ces couvertures achevées… Après tout cela, j’aurais terminé ?