Jeux d’enfants

J’ai vu ses yeux briller ce soir, d’une inhabituelle lueur. J’ai cru d’abord y reconnaître cet air qu’a sa sœur, souvent, lorsqu’elle s’apprête à faire une bêtise, cette air de joie un peu folle. J’ai souri à l’idée qu’elle, si sage, puisse devenir un instant un tourbillon incontrôlable. Mais ce n’était pas ça.

Alors, j’ai pensé à la joie de Noël qui approchait et qui lui donnait envie de danser et de rire si fort. Elle s’est laissée bercer par cette idée. Oui, ce devait être cela : Noël dans quelques jours, les visites aux familles, les cadeaux par milliers... Oui...

Elle a dansé encore un peu en souriant à ce défilé de merveilles à venir. Et puis, lorsque nous avons été seules, elle m’a avoué son secret : il avait partagé son jeu. Ils ont été seuls pendant quelques minutes. Elle a frôlé un vrai baiser. Un baiser d'enfant, du bout des lèvres. Mais tout de même, ç’aurait été le premier.

Son cœur bat fort encore dans les mots qu’elle prononce. Je la regarde. Elle est à la fois petite et si grande... Elle est mon enfant et simplement elle-même. Elle est merveilleuse ainsi : papillon sortant de sa chrysalide. Elle est amoureuse. 

Pas de reproche dans ma bouche, comme ce fut le cas à mon tour. Pas de « c’est trop tôt avant qu’il soit trop tard. » Si elle aime, c’est que tout mon travail a abouti : j’ai réussi. Je voulais transmettre l’amour. Elle l’a reçue et maintenant l’étincelle est brûlante dans sa poitrine. Va, vis, aime, mon amour ! J’ai réussi. Elle est amoureuse.