Il y a des moments qui vous remplissent et de joie et de peur. C'est pleine de cette ambivalence que je me suis rendue hier à la médiathèque Ernest Coeurderoy de Tonnerre où étaient organisées les rencontres littéraires Beyrouth/Bourgogne, animées par Salma Kojok. J'avais hâte de découvrir les amis de Salma, venus du Liban pour visiter la Bourgogne et partager leur amour des mots. J'avais hâte d'entendre des extraits de leurs textes. J'avais hâte de revoir Salma et mes amis de l'atelier d'écriture. Mais, j'étais tétanisée à l'idée de sortir de mon sac la feuille de papier qui contenait une part si lourde de ce que je tenais pour moi seule depuis 5 ans.
Lorsqu'elle nous avait annoncé cette rencontre, il y a quelques semaines, Salma m'avait demandée : "Alexandra, si tu le veux bien, j'aimerais que tu nous lises pendant cette soirée un extrait du roman sur lequel tu travailles en ce moment." J'avais frissonné, puis sourit et répondu d'une voix mal assurée : "D'accord." Je n'ai pas réfléchi longtemps. Je pressentais déjà quels passages conviendraient à l'exercice. Il fallait que le texte soit suffisamment abouti et qu'il fonctionne indépendamment du contexte pour être compris. J'ai isolé trois passages. Le premier était tiré du premier chapitre, mais me semblait trop descriptif. Le dernier, faisait apparaître un personnage secondaire dans une scène de rêverie. J'aime ce texte mais il n'était pas assez représentatif pour une lecture, me semblait-il.
Voici donc l'extrait que j'ai lu hier. Il est tiré du chapitre 5 de mon roman, une scène d'éveil qui précède une rencontre déterminante...
Lorsqu'elle nous avait annoncé cette rencontre, il y a quelques semaines, Salma m'avait demandée : "Alexandra, si tu le veux bien, j'aimerais que tu nous lises pendant cette soirée un extrait du roman sur lequel tu travailles en ce moment." J'avais frissonné, puis sourit et répondu d'une voix mal assurée : "D'accord." Je n'ai pas réfléchi longtemps. Je pressentais déjà quels passages conviendraient à l'exercice. Il fallait que le texte soit suffisamment abouti et qu'il fonctionne indépendamment du contexte pour être compris. J'ai isolé trois passages. Le premier était tiré du premier chapitre, mais me semblait trop descriptif. Le dernier, faisait apparaître un personnage secondaire dans une scène de rêverie. J'aime ce texte mais il n'était pas assez représentatif pour une lecture, me semblait-il.
Voici donc l'extrait que j'ai lu hier. Il est tiré du chapitre 5 de mon roman, une scène d'éveil qui précède une rencontre déterminante...
Une bûche incandescente se brise dans le foyer. Le bruit la réveille aussitôt. Elle pousse les couvertures qui s’entassent sur le canapé et se lève. Avec du petit bois, Annabelle relance le feu qui crépite aussitôt dans la cheminée. Fascinée par la danse des flammes, son regard est attiré tout à coup par la lumière qui filtre entre les interstices des volets. Annabelle resserre le grand châle de laine noire et épaisse qui entoure ses épaules et déplie les battants de bois. Ce matin, l’air est doux et ne lui pince pas la peau. Il lui semble aussi que c’est la première fois depuis longtemps que le soleil parvient à traverser le nuage de brume qui obscurcit continuellement cet hiver.
Intriguée, elle se dirige vers la porte, enfile ses bottes et fait un pas dehors. Elle marche jusqu’à un rayon de soleil et, avec un sourire de contentement, laisse une douce chaleur fondre sur son corps glacé.
La nature semble s’éveiller d’un long sommeil. Autour d’elle, les couleurs reviennent animer le paysage : du vert perce sur les branches des arbres, la neige laisse apparaître, par endroit, le brun de la terre et, dans le ciel, les nuages se dissolvent, épars, en longues traînées bleues. Le silence est brisé quelques fois par le son ténu des animaux alentour qui s’aventurent, eux aussi, hors de leurs abris. Un vent léger se met à souffler. Il ne peut jouer dans les cheveux trop courts de la jeune femme et poursuit sa route en faisant danser les branches des arbres sur son passage. Annabelle avance, légère, à la suite de ce guide invisible.
Au bout d’une heure d’errance, elle découvre une clairière. Le soleil réchauffe l’endroit, on se croirait au printemps. Même la nature s’y méprend : des fleurs violines au cœur tacheté de blanc commencent à y pousser. Annabelle fait quelques pas dans cet écrin de nature préservé du temps. Il fait bon. Elle s’assoit, puis s’étend dans les herbes hautes. La terre est tiède. Elle ferme les yeux un instant. Un sentiment de bien-être l’envahit. Elle se sent vivante à nouveau. À travers ses paupières closes, elle sent la chaleur du soleil sur son visage. Elle savoure cette sensation qu’elle croyait oubliée pour toujours. Elle ne peut pas rester ici bien sûr, il faudra qu’elle songe à se lever, à rentrer. Mais pas encore. Les minutes passent. L’hiver et sa morsure lui paraissent loin maintenant.
Merci pour le partage, Alexandra.au plaisir d'échanger encore et encore nos mots et nos émotions dans l'avenir, à Tonnerre ou à Beyrouth, pourquoi pas ?
RépondreSupprimerMichèle, ce fut une joie de te rencontrer, de découvrir par ta voix toute la poésie de tes écrits, de te lire et de t'accueillir sur cette page à présent. Merci pour tout cela et à bientôt, ici ou là-bas, avec grand plaisir !
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